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59Assomption
61Italie

60. Mabillon, réel 3

juin 1971

Lieux
Juin 71
Mabillon
Réel

Samedi 12 juin
Vers 15 h

Recopié le 1er août 1971

Café « L’Atrium ».

Un car de police gris vient de s’arrêter à la hauteur du magasin de vêtements « Lip’s ». En sont descendues des flics femelles carnet de contraventions à la main.

À côté de « Lip’s », un immeuble noir en réfection ou en démolition. Sur la palissade qui masque son rez-de-chaussée, trois publicités, une pour La Maison sous les arbres 1 (titre masqué par une série de portraits jaunes sous lesquels je crois lire « Passionaria »), l’autre pour Taking off, la troisième pour On est toujours trop bon avec les femmes (titre masqué par des points d’interrogation blancs et violets – dont je sais, pour l’avoir [vue] de plus près il y a un instant, qu’il s’agit d’une affiche invitant à un débat public avec Laurent Salini, PCF)2.

Au croisement Buci-Saint-Germain, un pylône portant à son sommet un drapeau tricolore et, au tiers de sa hauteur, un panneau pour l’exposition Rouault3.

Au premier plan, grilles, ou plutôt chaînes empêchant de traverser le boulevard. On y accroche4 des petits panonceaux pour la revue Crée « la première revue française de design d’art et d’environnement contemporain » ; la couverture de la revue représente une palissade.

Circulation fluide.

Peu de monde dans le café.

Pâle soleil perçant sous les nuages. Temps frais.

Les gens : généralement seuls, maussades. Parfois en couple. Des jeunes mères avec leurs jeunes enfants ; des filles, par deux ou trois ; rares touristes. Imperméables longs, beaucoup de vestes ou chemises militaires (américaines).

Kiosque à journaux en face :

Automobile : Le Mans

« Romy Schneider inculpée ! »

Week-end : « une caméra révèle les gagnants » (?!)

(j’ai encore une bonne vue !!)

Encore un car de flics (le troisième depuis mon arrivée).

Traînant dans les rues, Claude (?) Languepin (?) (l’ami de Michèle Georges, le scénariste de Mitrani) : je le rencontre souvent ainsi5. (Je savais que statistiquement je devais apercevoir quelqu’un que je connaissais6.)

Esquisse d’une typologie de la marche7 : la plupart flânent, traînent, n’ont pas d’idée précise quant à l’endroit où ils vont8.

Un couple en terrasse me masque la vue.

Il se met à pleuvoir.

NOTES

1 Voir le texte 52, n. 5.

2 Taking off, comédie dramatique de Milos Forman (1971) ; On est toujours trop bon avec les femmes, comédie dramatique de Michel Boisrond (1971) ; Laurent Salini, journaliste, membre du Parti communiste français, alors chef du service politique et social de L’Humanité

3 Il s’agit de l’« Exposition du centenaire » du peintre qui eut lieu au musée national d’Art moderne du 27 mai au 27 septembre 1971.

4 Var. prise de notes et texte imprimé : « on y a accroché ».

5 Var. texte imprimé : « Passe d’un pas un peu traînant un ami que je rencontre souvent flânant ainsi dans les rues. » Il s’agit plutôt de Claude Varlin, scénariste de Michel Mitrani pour le film La Nuit bulgare (tourné en 1969 et sorti en 1972). Jean-Jacques Languepin est un cinéaste, auteur notamment de nombreux films sur la montagne. Perec confond régulièrement ces deux noms ; par exemple, dans un texte inédit proche de la démarche de Lieux écrit le 26 mai 1971 et intitulé « Pèlerinages », il écrit : « À Saint-Germain j’ai croisé (ça va ça va ça peut aller) Claude (ou Jean-Jacques) Languepin (ami de Michèle Georges) » (FGP 36, 12, 1-2). Néanmoins, dans ses agendas-journaux, Perec mentionne encore régulièrement « Claude Languepin », souvent en compagnie de Michèle Georges (par exemple le 30 mai 1975 : « en sortant [du cinéma], rencontre Claude Languepin et Michèle Georges » – FGP 33, 78 v°).

6 Remarque absente du texte publié.

7 Dans la prise de notes et le texte imprimé, cette phrase se termine par un point d’interrogation.

8 Peu d’années plus tard, en 1974, Perec se livrera dans Tentative d’épuisement d’un lieu parisien à diverses esquisses de semblables typologies à propos d’un endroit proche de Mabillon, la place Saint-Sulpice (par exemple : « La plupart des gens ont au moins une main occupée […] » – Œ2, p. 822). Voir aussi le texte 68.

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